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Par la pensée, ces quelques maigres fascicules pourraient recéler la quintessence enchanteresse de L’Iliade ou de L’Odysée, les failles et les déchirements de la matière humaine narrés dans Crimes et Châtiments ou dans Notre-Dame de Paris.

Dans mon esprit, ils figureraient également à loisir la mémorable cristallisation de l’instant amoureux décrite dans Le Rouge et le Noir, le pouvoir irrésistible et fascinant du désir de Madame Bovary, les meurtres ou les assassinats les plus cruels de Guerre et Paix et des Frères Karamasov ou, encore, la subtilité insensée de l’introspection transcendée par l’écriture d’A la Recherche du temps perdu.

Dans mon rêve, ils s’incarneraient aussi dans les méandres de la déconstruction linguistique de Finnegans wake, puis dans les reconstructions métagraphiques romanesques des Journaux des Dieux, de Saint Ghetto des Prêts, de Initiation à la haute volupté, des brisures irrémédiables du Roman du Soulèvement de la Jeunesse, d’Images à lire, de Poïesis ou encore de Jonas ou le corps à la recherche de son âme, des Mystères de Phi, des Platanes alignés, de Manipulitude et, puisqu'il faut clore provisoirement cette énumération, dans l’hermétisme extrême de De la Carritude en Lettrisme, de L’une ou la même, l’autre, et de Roman à Equarrir.

Toutefois, je pense qu’une beauté plus sublime encore résiderait dans le fait que mes lecteurs potentiels se métamorphosent en auteurs pour augmenter ma quête d’un thème, d’un sujet et donc d’un titre servant à l’étalement sans fin de mes carrés alignés depuis les années soixante-dix. Il pourrait s’agir d’une histoire d’atrocités guerrières, d’une épopée voluptueuse, d’une histoire d’amours insensées, mais aussi d’un de ces nouveaux« Romans infinis », chers à Von Hardenberg, embrassant, sur le plan d’une thématique possible, une narration à clé ou les clés possibles d’une nouvelle émanation fictionnelle encore indécelable.

Lecteurs, c’est à vous maintenant de trouver tous les thèmes de mon roman et de lui  attribuer un titre.


C’est en feuilletant une vieille édition du Mariage de Figaro publié par La Librairie de la Bibliothèque Nationale au début du XXe siècle que j’ai découvert avec délice une publicité pour une revue à fascicule intitulé « Lisez-moi » énumérant les titres de toutes une série d’ouvrages d’auteurs désormais entrés, comme le disait isidore Isou, dans les poubelles de l’histoire.

J’ai immédiatement conçu un nouveau roman portant le titre de Roman sans nom où j’imaginais que le lecteur imprimerait du sens, plus précisément un thème qui souvent se matérialise par le biais d’un titre qui lui sert d’éclairage général. C’est à vous tous lecteurs que je demande de nourrir ma matière textuelle par un titre attrayant ou repoussant, complexe ou primaire, ordinaire ou sublime.

Anne-Catherine Caron, 2010.


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LE ROMAN SANS NOM ou LE ROMAN DE LA VILLA TAMARIS (Narration supertemporelle), Publications PSI, 2010.

D'abord présenté dans la Galerie-du-sac-de-la-dame avant d'être proposé au public dans le cadre de l'exposition Lettrisme : vue d'ensemble sur quelques dépassements,  à la Villa Tamaris, la Seyne-sur-mer, du  19 octobre au 28 novembre 2010.